Retrouvez les discours de la cérémonie du 11 novembre
- Le 11/11/2020
Ce 11 novembre, un hommage a été rendu aux morts pour la France, mais aussi à Samuel PATY et aux victimes des attentats.
Cette cérémonie fut particulièrement émouvante de par le silence et la profondeur du recueillement, le nombre de participants étant limité à une douzaine de participants pour des raisons sanitaires.
Retrouvez dans la suite du billet les discours qui ont été prononcés lors de cette cérémonie.
Discours lu par le maire, de Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée à la Mémoire et aux Anciens combattants
C’était il y a un siècle.
Ce 10 novembre 1920, la Grande Guerre est achevée depuis deux ans. Dans la citadelle de Verdun, Auguste THIN, soldat de deuxième classe et pupille de la Nation, dépose un bouquet d’œillets blancs et rouges sur le cercueil d’un soldat. Un parmi tous les combattants des Flandres, de l’Artois, de la Somme, du Chemin-des-Dames, de Lorraine, de la Meuse... Un de ces braves ! Un des poilus qui participa à une interminable guerre. Un de ces Français qui œuvra à la tâche incommensurable de la Victoire. Un parmi des milliers qui est devenu le Soldat inconnu.
Le 11 novembre 1920, le peuple de France l’accompagne solennellement sous les voûtes de l’Arc de Triomphe. La patrie, reconnaissante et unanime, s’incline respectueusement devant son cercueil, en saluant la mémoire de tous les soldats morts sous le drapeau tricolore.
Quelques mois plus tard, il était inhumé. Depuis 1923, la Flamme du Souvenir veille, nuit et jour, sur la tombe. Chaque soir, elle est ravivée pour que jamais ne s’éteigne la mémoire. La sépulture du Soldat inconnu est devenue le lieu du recueillement national et le tombeau symbolique de tous ceux qui donnent leur vie pour la France. Cet anonyme représente chacun de nos morts et tous nos morts en même temps.
Cette mémoire vit également dans chacune de nos communes, dans chaque ville et village de France, dans chacun de nos monuments aux morts, dans chacun des cimetières, dans nos mémoires familiales. Elle vit dans l’œuvre de Maurice GENEVOIX qui entre aujourd’hui au Panthéon. Le Président de la République l’a souhaité en l’honneur du peuple de 14-18.
Maurice GENEVOIX n’entre pas seul dans le temple de la Nation. Il y entre en soldat des Eparges, en écrivain et en porte-étendard de « Ceux de 14 ». Il y entre avec ses millions de frères d’armes, ceux dont il a immortalisé le souvenir, l’héroïsme et les souffrances. Il y entre avec toute la société, de la première ligne à l’arrière, mobilisée face à l’adversité et qui a tenu avec une admirable endurance.
8 millions de soldats combattirent sous les couleurs de notre drapeau, aucun d’entre eux ne revint totalement indemne. Des centaines de milliers furent blessés dans leur chair comme dans leur âme. 1 400 000 tombèrent au champs d’honneur. Nous ne les oublions pas. Inlassablement, nous les honorons.
Chaque 11 novembre, la Nation rend également un hommage solennel à tous les morts pour la France, ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui. Chaque année, nous rappelons leur nom.
Chaque 11 novembre est un moment d’unité nationale et de cohésion autour de ceux qui donnent leur vie pour la France, de ceux qui la servent avec dévouement et courage. En ces instants, au souvenir des évènements passés et aux prises avec les épreuves de notre temps, nous nous rappelons que c’est tout un peuple, uni et solidaire, qui fit la guerre, qui la supportaet en triompha.
Suivent les noms de 20 morts pour la France.
Hommage aux enseignants et victimes des attentats
Le 16 octobre, Samuel PATY, professeur à Conflans Ste-Honorine était lâchement assassiné, décapité pour vouloir expliquer à ses élèves la liberté de pensée et d’expression. Le 29 octobre Simone Barreto, Nadine Devillers et Vincent Loquès subirent le même sort pour simplement être présents dans la basilique Notre-Dame à Nice.
En ce jour de commémoration du 11 novembre 2020, 102ème anniversaire de la libération de la guerre de14 /18, la municipalité a souhaité rendre hommage à ces victimes innocentes en lisant un texte de Gauvin Sers pour que liberté, égalité, fraternité restent nos valeurs et soutiennent les familles et leurs proches.
Une vingtaine de collégiens et lycéens aoustois souhaitaient participer à cette cérémonie de commémoration en déposant une gerbe et en lisant ce texte.
Nous les remercions vivement, mais les circonstances sanitaires actuelles, ne nous le permettent pas.
Texte de Gauvin Sers
Paraît qu’on s’habitue
Aux larmes de la nation
Ce matin, j’me suis tu
Sous l’coup de l’émotion
Paraît qu’on s’habitue
Quand l’infâme est légion
Tous ces hommes abattus
Pour les traits d’un crayon
Paraît qu’on s’habitue
À défendre à tout prix
Les 3 mots qu’on a lus
Aux frontons des mairies
Paraît qu’on s’habitue
Quand on manque de savoir
Par chance, on a tous eu
Un professeur d’Histoire
Paraît qu’on s’habitue
À la pire barbarie
Mais jamais j’n’y ai cru
Et pas plus aujourd’hui
Paraît qu’on s’habitue
Aux horreurs qu’on vit là
Mais l’innocent qu’on tue
Je ne m’habitue pas.
Lettre de Jean Jaurès, La Dépêche, journal de la démocratie du midi , 15 janvier 1888
Aux Instituteurs et Institutrices,
Vous tenez en vos mains l’intelligence et l’âme des enfants ; vous êtes responsables de la patrie. Les enfants qui vous sont confiés n’auront pas seulement à écrire et à déchiffrer une lettre, à lire une enseigne au coin d’une rue, à faire une addition et une multiplication. Ils sont Français et ils doivent connaître la France, sa géographie et son histoire : son corps et son âme. Ils seront citoyens et ils doivent savoir ce qu’est une démocratie libre, quels droits leur confère, quels devoirs leur impose la souveraineté de la nation. Enfin ils seront hommes, et il faut qu’ils aient une idée de l’homme, il faut qu’ils sachent quelle est la racine de toutes nos misères : l’égoïsme aux formes multiples ; quel est le principe de notre grandeur : la fierté unie à la tendresse.
Il faut qu’ils puissent se représenter à grands traits l’espèce humaine domptant peu à peu les brutalités de la nature et les brutalités de l’instinct, et qu’ils démêlent les éléments principaux de cette œuvre extraordinaire qui s’appelle la civilisation. Il faut leur montrer la grandeur de la pensée ; il faut leur enseigner le respect et le culte de l’âme en éveillant en eux le sentiment de l’infini qui est notre joie, et aussi notre force, car c’est par lui que nous triompherons du mal, de l’obscurité et de la mort.
Eh quoi ! Tout cela à des enfants ! — Oui, tout cela, si vous ne voulez pas fabriquer simplement des machines à épeler. Je sais quelles sont les difficultés de la tâche. Vous gardez vos écoliers peu d’années et ils ne sont point toujours assidus, surtout à la campagne. Ils oublient l’été le peu qu’ils ont appris l’hiver. Ils font souvent, au sortir de l’école, des rechutes profondes d’ignorance et de paresse d’esprit, et je plaindrais ceux d’entre vous qui ont pour l’éducation des enfants du peuple une grande ambition, si cette grande ambition ne supposait un grand courage. […]
Sachant bien lire, l’écolier, qui est très curieux, aurait bien vite, avec sept ou huit livres choisis, une idée, très générale, il est vrai, mais très haute de l’histoire de l’espèce humaine, de la structure du monde, de l’histoire propre de la terre dans le monde, du rôle propre de la France dans l’humanité. Le maître doit intervenir pour aider ce premier travail de l’esprit ; il n’est pas nécessaire qu’il dise beaucoup, qu’il fasse de longues leçons ; il suffit que tous les détails qu’il leur donnera concourent nettement à un tableau d’ensemble. De ce que l’on sait de l’homme primitif à l’homme d’aujourd’hui, quelle prodigieuse transformation ! et comme il est aisé à l’instituteur, en quelques traits, de faire sentir à l’enfant l’effort inouï de la pensée humaine ! […]
Je dis donc aux maîtres, pour me résumer : lorsque d’une part vous aurez appris aux enfants à lire à fond, et lorsque d’autre part, en quelques causeries familières et graves, vous leur aurez parlé des grandes choses qui intéressent la pensée et la conscience humaine, vous aurez fait sans peine en quelques années œuvre complète d’éducateurs. Dans chaque intelligence il y aura un sommet, et, ce jour-là, bien des choses changeront. »